L’état de la réalité virtuelle au Canada
Voici un tour d’horizon de l’état du marché de la réalité virtuelle (RV) au Canada, tel que présenté par le site web Pouls de la RV. Le Canada a la possibilité de devenir un chef de file de la RV. Cependant, les entrepreneurs doivent se préparer à surmonter trois principales difficultés: la maturité du marché, les ressources humaines et le financement.
Lancé fin juin 2017, le site web bilingue Pouls de la RV présente un portrait de l’écosystème canadien de la réalité virtuelle (RV). Vous y retrouverez des études de cas approfondies de quelques grands joueurs canadiens de la RV, une liste des compagnies canadiennes qui œuvrent dans ce secteur ainsi que les résultats d’une enquête menée dans plusieurs provinces du pays.
Pouls de la RV offre aussi une analyse trimestrielle du marché de la RV au Canada. Nous vous en offrons les grandes lignes ici sur FMC Veille.
Analyse de la situation au 1er trimestre de 2017
L’industrie de la réalité virtuelle (RV) au Canada et partout ailleurs sur la planète demeure un secteur naissant. Le battage médiatique a commencé à ralentir et les véritables données commencent à faire surface.
C’est ainsi que nous sommes maintenant en mesure de faire un certain nombre d’observations clés :
- Les casques les moins chers se vendent mieux, mais l’adoption à grande échelle est encore loin de poindre à l’horizon;
- Les montants investis en RV sont demeurés élevés tout le long de 2016, bien qu’on constate le début d’un essoufflement;
- Une bonne partie des investissements en RV sont faits par des plateformes et des fabricants à la recherche de la prochaine appli qui aura un succès monstre.
- La plupart des entreprises canadiennes de RV proposent du contenu ou des applications;
Chiffres de vente : des résultats mitigés
Comme l’illustre le tableau qui suit, les chiffres de vente illustrent la vitesse à laquelle la RV fait son entrée « grand public ».
Certains chiffres sont prometteurs. Par exemple, Sony en a surpris plusieurs en présentant des chiffres de vente solides pour son casque PSVR : 915 000 unités vendues en quatre mois. De plus, Samsung a affirmé que 5 millions d’unités de son casque ont été expédiées au début de 2017.
Cependant, les chiffres concernant les casques haut de gamme sont moins prometteurs. HTC a vendu moins de 500 000 unités de son Vive, tandis qu’Oculus a vendu quelque 243 000 casques Rift.
En bref, bien que les casques et les forfaits à prix réduit contribuent à accroître les ventes, aucune plateforme de RV n’a encore fait l’objet d’une adoption généralisée à grande échelle.
La « colonne » de la RV
Cependant, les principales données sur les ventes ne disent pas tout sur la RV. Il faut plutôt creuser davantage pour comprendre comment les produits de RV sont développés et ainsi comprendre comment l’industrie se développe. À cette fin, l’écosystème de la RV peut être largement structuré autour de la « colonne » d’éléments interconnectés illustrés ci-contre.
Le matériel, au bas de la colonne de la RV, est dominé par de grands joueurs (par ex., Samsung et HTC) et est façonné par des investissements considérables dans les casques de RV et des solutions pratiques (par ex., saisie, repérage).
L’année 2016 a été une année décisive pour l’industrie, car les principaux fabricants de matériel ont franchi un certain nombre de jalons. Mentionnons le lancement de PlayStation VR (Sony), de la plateforme Daydream (Google) et du contrôleur de mouvement Touch (Oculus) ainsi que l’annonce par Microsoft de l’arrivée prochaine de casques de RV à technologie holographique pour la plateforme Windows.
Alors que l’innovation s’accélère dans l’ensemble de la colonne, c’est surtout en haut de celle-ci que se situent les occasions à saisir pour les nouvelles entreprises de RV. Les plateformes de RV et les fabricants de matériel de RV financent le développement de contenus en espérant qu’un de ces contenus mènera à une adoption élargie de la RV – l’élusive « appli qui aura un succès monstre ».
De plus, un nombre croissant de start-ups explorent de possibles débouchés en matière de logiciels et de contenus, là où les plateformes (comme Oculus) et les fabricants (comme Samsung) n’ont pas l’expertise nécessaire pour proposer des produits/services concurrentiels.
Investissements en RV : le contenu de RV est-il roi?
Les principales plateformes de RV (par ex., Oculus, HTC, Samsung, etc.) continuent d’investir dans le contenu pour élargir leurs catalogues de lancement. De plus, en 2016, des investisseurs corporatifs stratégiques comme Twentieth Century Fox ont investi dans des studios de développement de contenu dont la technologie est assortie d’une solide propriété intellectuelle.
Certains de ces investissements sont présentés dans le tableau qui suit.
Vers la fin de 2016, les investissements dans les studios de contenu ont cédé la place à des investissements considérables dans des sociétés interentreprises (B2B) œuvrant dans des secteurs autres que le divertissement. À cet égard, soulignons l’investissement par Andreessen Horowitz dans l’appli de productivité sociale Big Screen.
Cependant, au premier trimestre de 2017, selon les données de Crunchbase, il y a eu ralentissement des financements et des investissements totaux de capital en RA/RV. En effet, l’opinion globale des investisseurs à l’égard de la RV a récemment changé, et ce, malgré d’importants témoignages de confiance comme les investissements considérables faits par Google pour acquérir Owlchemy Labs.
La réalité, une occasion à saisir
Même si l’industrie de la RV se trouve dans la « vallée de la désillusion » pour citer Gartner, une baisse des attentes du public et de la confiance des investisseurs ne devrait pas pour autant être une cause de consternation. Au contraire, le ralentissement du cycle du battage crée un espace permettant de concevoir intentionnellement les fondements d’une croissance mesurée et réfléchie de cette industrie émergente.
Ce développement est une bonne nouvelle pour le Canada, un pays qui se positionne avantageusement au sein de cette industrie croissante comme une source considérable d’appuis publics et de talents.
État de l’écosystème canadien
Une forte majorité (84 %) des sociétés canadiennes de RV se vouent au développement de contenus ou d’applications de RV. Les forces du Canada dans les secteurs du cinéma, des jeux et des effets visuels ont fait du pays une des principales plaques tournantes pour la création de contenu et le développement d’applications en RV.
Des sociétés canadiennes de contenus et d’applications en RV comme Félix & Paul Studios, Secret Location (acquise par eOne), Liquid Cinema, Mettle et Cloudhead Games figurent parmi les sociétés les mieux connues dans le monde. Il semble y avoir actuellement une fenêtre d’opportunité en ce qui a trait à l’investissement dans le contenu et la technologie de RV alors que la qualité des contenus et des applications gagnera considérablement en valeur à moyen terme. De plus, alors que le nombre de propriétaires de casques de visionnement augmentera, le marché des contenus et des applications croîtra rapidement à moyen-long terme.
Que ce soit au Canada ou en Californie, la technologie et le contenu sont très intégrés dans la RV. Ces deux éléments clés doivent progresser simultanément pour assurer le succès du secteur de la RV à long terme.
Aujourd’hui, un des principaux obstacles à l’adoption par les consommateurs est le manque de contenu de RV de qualité. Du contenu de RV de qualité est difficile à produire parce que sa production requiert des processus créatifs et une infrastructure technologique tout à fait nouveaux.
Contrairement aux médias traditionnels, le support technologique requis pour créer, produire et livrer du contenu de RV de première qualité doit être bâti de rien. Ces exigences donnent lieu à une nouvelle forme de créateurs de contenu : des créateurs dont la technologie fait partie de leur ADN. Pour cette raison, la disponibilité des talents confère au Canada un avantage dans l’écosystème mondial de la RV.
Principales difficultés au Canada
Le Canada a la possibilité de devenir un chef de file de la RV. Cependant, les entrepreneurs doivent se préparer à surmonter trois principales difficultés :
- Maturité du marché : Le développement du marché de la RV n’en est qu’à ses balbutiements et il demeure incertain à quel rythme les consommateurs adopteront les casques de RV ou seront prêts à payer pour des expériences de RV. Les résultats de notre étude indiquent que les sociétés canadiennes de RV s’attendent à ce que cette technologie fasse l’objet d’une adoption généralisée d’ici deux à cinq ans.
- Ressources humaines : À l’instar d’autres technologies émergentes, la RV fera probablement face à une pénurie de talents. En effet, il reste à savoir si les ressources compétentes seront suffisantes pour répondre à la demande future des petits et grands joueurs. Il est possible que les entrepreneurs doivent avoir recours à des techniques de recrutement de base (par ex., travailler de concert avec les universités) et fournir de la formation pour recruter et retenir le talent. De plus, une possible pénurie de travailleurs en RV au Canada pourrait favoriser le regroupement de sociétés canadiennes de RV.
- Financement : Les investisseurs sont prudemment optimistes quant aux perspectives de la RV. Des plateformes comme Oculus alimentent le développement de contenus et d’applications. Cependant, le financement de telles plateformes n’est pas viable. Les entrepreneurs sont encouragés à poursuivre des cas d’utilisation uniques (par ex., interentreprises ou B2B) en ayant recours à des modèles d’entreprise viables. Il sera donc important pour les jeunes pousses en RV de demeurer agiles et de se préparer à une période de rodage d’au moins 24 mois.