Quatre tendances technologiques mondiales de fond à ne pas négliger

Le rapport Internet Trends de la spécialiste en capital-risque américaine Mary Meeker, soit la «bible technologique» attendue chaque année par bon nombre d’investisseurs, chercheurs et journalistes spécialisés en technologie, a récemment été publié. Voici quatre tendances que nous avons dégagées de ses quelque 334 pages.

La fondatrice de Bond Capital et ex-associée de la société de capital de risque Keiner Perkins publie ce rapport depuis 1995, qui a gagné en crédibilité année après année. Même s’il comprend principalement des données de sources américaines et que Mary Meeker a un intérêt financier à décrire l’état du monde numérique, le rapport offre un très bon aperçu des tendances et se fonde sur des faits généralement fiables.

1. Vers une saturation du taux de pénétration du World Wild Web

Plus de la moitié de la population mondiale utilise l’Internet, soit 3,8 milliards de personnes. Bien que le Web continue à faire des adeptes (+6%), sa croissance connaît un ralentissement par rapport à l’année de référence précédente (2017). Sans surprise, les Chinois comptent le plus d’internautes sur la planète avec 21%, suivi de l’Inde avec 12% et les États-Unis, avec 8%.

Comme le mentionnait Mary Meeker l’an dernier, lorsqu’un marché devient grand public, la croissance se révèle plus difficile à trouver.

Le déclin du nombre de ventes de nouveaux téléphones intelligents pour la deuxième année consécutive (- 4% selon Morgan Stanley) en est un bon indicateur, puisqu’il agissait comme véritable catalyseur du taux de pénétration dans la dernière décennie.

L’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie du Pacifique sont les derniers marchés où le taux d’adoption de l’Internet demeure sous les 50%.

2. Presque constamment branchés pour le meilleur et pour le pire

Si le taux de pénétration commence à plafonner, le nombre d’heures passées chaque jour en ligne par les adultes américains s’accélère année après année pour atteindre 6,3 heures, principalement en raison du mobile, dont l’utilisation s’est encore accrue (3,6 heures) par rapport à l’ordinateur fixe ou portable (2 heures).

Un sondage de Pew Research de juillet 2018 montre aussi que le quart des adultes américains sont maintenant «constamment en ligne», plus particulièrement les 18 à 29 ans (39%) et les 30 à 49 ans (36%).

Le temps passé sur les appareils mobiles a maintenant supplanté celui du petit écran. En 10 ans, le temps d’écoute télévisé quotidien est en effet passé de 266 à 216 minutes contre 20 à 226 minutes sur le mobile. Le visionnement de vidéos en ligne a pour sa part plus que doublé en cinq ans, révèle un sondage d’octobre 2018 d’eMarketer.

«Être branché» ne signifie plus seulement avoir les yeux rivés sur un écran d’ordinateur ou sur son cellulaire. Le nombre de personnes qui écoutent des balados aux États-Unis a environ doublé en quatre ans (rapport The Infinite Dial 2019 d’Edison Research) et il en va de même des dispositifs portables (eMarketer, novembre 2018).

Ce temps est cependant jugé trop élevé par les utilisateurs. Ainsi, un plus grand nombre de personnes tentent de réduire leur utilisation, soit 63% des répondants, par rapport à 47% l’année précédente, nous révèle une étude de novembre 2018 menée aux États-Unis par Deloitte Mobile Consumer auprès des utilisateurs d’appareils mobiles.

Ce changement d’attitude n’est pas passé inaperçu auprès des grands joueurs technologiques, qui ont proposé en 2018 des fonctionnalités pour suivre et contrôler son temps passé sur les plateformes.

Les chiffres du rapport de janvier 2019 de Hootsuite et WeAreSocial Digital 2019 révèlent quant à eux que le temps passé sur les médias sociaux diminue, son taux de croissance se situant à 1% contre 6% au premier trimestre de 2018.

3. Le coût d’acquisition de clientèle pourrait être non viable à long terme

Les investissements en publicité numérique se sont accélérés en 2018 (+22%).

Toutefois, les plateformes dominantes aux États-Unis, soit Google, Facebook, Twitter, Amazon, Snapchat et Pinterest, ont vu leurs revenus publicitaires ralentir, si on compare les quatre trimestres de 2018 avec ceux de l’année précédente.

Google et Facebook continuent à empocher la majorité de ces revenus, mais elles se font de plus en plus gruger leur part du gâteau par Amazon, Twitter, Pinterest et Snapchat.

Malgré de multiples plateformes publicitaires offertes sur le marché et de meilleures capacités de cibler la clientèle grâce aux données, les coûts de conversion des clients augmentent dans des secteurs très compétitifs comme les finances, à un point tel où ils pourraient devenir non viables à long terme, soutient Mary Meeker.

4. Le modèle d’affaires semi-gratuit des jeux vidéo gagne les entreprises et les consommateurs

Certaines entreprises ont trouvé des solutions pour absorber les importants coûts d’acquisition de la clientèle, inspirées de l’univers des jeux vidéo. En effet, des jeux comme Runescape étaient d’abord gratuits, jusqu’à ce qu’ils proposent un abonnement payant qui ajoutait de la valeur pour les joueurs et permettait aux créateurs d’améliorer le jeu. Ce modèle «freemium» a ensuite commencé à s’étendre aux entreprises.

Pour la plateforme Spotify, par exemple, l’offre gratuite de base compte pour environ 60% des nouveaux abonnés à la version payante du produit (Spotify Premium). Le service gratuit soutenu par les publicités compense ainsi les coûts d’acquisition de la clientèle, a mentionné le chef des finances de l’entreprise, Barry McCarthy lors du Spotify Investor Day en mars 2018.

Les essais gratuits se révèlent d’ailleurs la principale raison évoquée par les répondants adultes de différents pays à un sondage de 2BrightCove et YouGov, pour essayer un nouveau service de diffusion en continu (42%).

Pour approfondir la réflexion, vous pouvez consulter le rapport intégral et comparer ces tendances à celles de notre dernier rapport sur les tendances 2019.


Catherine Martellini
Créatrice de contenu multiplateforme, éditrice et journaliste, Catherine Martellini a collaboré à de nombreux médias et publications culturelles. Plus récemment, elle agit comme collaboratrice spéciale au journal Le Devoir et à Infopresse, un média spécialisé en communication, marketing, numérique et leadership où elle a également occupé le poste de rédactrice en chef.
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