Dans les coulisses d’Interstellar Arc de Felix & Paul Studios
De quoi aura l’air l’exploration spatiale dans les prochains siècles? Après des expériences documentaires en réalité virtuelle avec la NASA, Felix & Paul Studios se tourne vers la fiction dans Interstellar Arc. Ce premier spectacle permanent pour le studio montréalais débute ces jours-ci à Las Vegas, aux États-Unis.

Interstellar Arc est une expérience immersive d’une heure, où les visiteurs se glissent dans la peau d'explorateurs à l’aube d’un voyage de 262 ans vers une exoplanète. Les porteurs de casque de réalité virtuelle (RV) se réveillent d’un sommeil cryogénique et explorent leur vaisseau spatial en marchant dans ce qui est en réalité un grand studio de 20 000 pieds carrés.
« C’est en quelque sorte le point culminant de tout ce qu’on a fait jusqu’ici », lance Félix Lajeunesse, cofondateur et directeur créatif de Felix & Paul Studios, en entrevue.
Si l’entreprise montréalaise s’est surtout fait remarquer pour ses créations documentaires ces dernières années, elle a aussi à son actif plusieurs projets de fiction, dont Miyubi, un film en RV avec l’acteur américain Jeff Goldblum (Le parc Jurassic, Le jour de l’indépendance), sorti en 2017 et gagnant d'un prix Peabody.
Pour ancrer la fiction dans le réel, le studio a collaboré avec la famille de l’astronome américain Carl Sagan, en plus de s’inspirer de ses années de travail avec la NASA et des classiques de la science-fiction. « J’ai grandi avec les bandes dessinées de Mœbius et Philippe Druillet, poursuit Félix Lajeunesse. Dans les années 1970, il y avait une liberté créative incroyable dans les bandes dessinées européennes. On retrouvait cette idée d’un imaginaire sans limites, et c’est exactement ce qu’on voulait proposer avec Interstellar Arc. Je crois qu’on a trouvé un bon compromis entre rigueur scientifique et imaginaire. »
Une première résidence permanente
Les créateurs d’Interstellar Arc ont profité des apprentissages d'un autre de leurs projets : Space Explorers : L’infini, une expérience immersive inspirée des missions de la NASA et présentée dans plusieurs grandes villes du monde depuis 2021.
« Monter et démonter un spectacle de cette ampleur dans chaque ville, c’est un travail colossal. Pour le projet suivant, nous voulions tout concevoir pour un seul lieu », explique Félix Lajeunesse.
Ce lieu, c’est la ville de Las Vegas, aux États-Unis. Plus précisément dans l’AREA15, un immense complexe immersif à l’extérieur de la Strip, qui rassemble plus d’une vingtaine d’activités et d’expériences.
Selon Félix Lajeunesse, en optant pour une résidence permanente, ils se sont simplifié la tâche, mais ils améliorent aussi le produit fini : « Faire la présentation dans un endroit unique nous permet de pousser la scénographie plus loin, d’avoir un avant et un après-spectacle à la hauteur », estime-t-il.
AREA15 n’a pas été difficile à convaincre. « On choisit nos partenaires en fonction de leurs capacités. Certains ont une vision créative, d’autres des capacités opérationnelles de déployer de grands concepts, et d’autres sont capables d’obtenir du financement. Rares sont ceux qui ont les trois, comme Felix & Paul Studios », a observé Michael Casper, vice-président du développement des affaires à AREA15, lors d’une présentation à la conférence HUB Montréal, en octobre dernier.
Des défis créatifs et techniques
Il a fallu trois ans pour développer Interstellar Arc. « Nous n’avons pas suivi de scénario de manière rigide, car c’est un nouveau terrain de jeu. On a appris à mesure qu’on avançait », a expliqué Stéphane Rituit, cofondateur et PDG de Felix & Paul Studios, toujours à HUB Montréal.
Pour ce nouveau spectacle, 170 visiteurs défilent à l’heure dans le vaisseau spatial, incluant 40 minutes durant lesquelles ils se déplacent librement avec un casque de RV Meta Quest 3S. « Quand on vit une expérience immersive, on a l’impression d’avoir un libre arbitre, de se déplacer naturellement. Notre défi, c’était d’amener le public dans un arc narratif sans qu’il ait l’impression d’être dirigé », dit Félix Lajeunesse.
Le spectacle a aussi eu son lot de défis technologiques, notamment celui de faire marcher les visiteurs dans un espace physique trois fois plus petit que celui qu’ils visitent virtuellement. Des algorithmes ont été développés pour donner l’impression aux joueurs qu’ils marchent en ligne droite, même s’ils se déplacent en réalité en boucle.

Le début d’un long voyage
Interstellar Arc devrait évoluer au cours des prochains mois. « L’expérience sera bonifiée parce que nous aurons alors eu un peu plus de temps pour compléter notre vision, mais elle ne sera pas totalement différente », précise Félix Lajeunesse.
Si les spectacles permanents doivent souvent se réinventer pour inciter les visiteurs à revenir, ce n’est pas le cas dans la capitale américaine du jeu. Michael Casper rappelle que le public de Las Vegas se renouvelle tous les trois jours.
Le spectacle pourrait toutefois avoir une suite sachant que le voyage interstellaire s’arrête au moment où la planète est découverte. « La finale est satisfaisante, mais elle donne aussi l’impression que c’est le premier chapitre d’une histoire. On n’a pas de plan précis, mais on aimerait définitivement raconter la suite », conclut Félix Lajeunesse.