De l’évolution des narrations en 2023
Les histoires, ainsi que les plateformes qui les distribuent, proposent des fonctionnalités de plus en plus innovantes, de sorte que les publics évoluent continuellement dans leurs façons de trouver du contenu et d’interagir avec lui. L’évolution de la technologie offre de nouvelles options pour créer des histoires et les connecter avec le public. Découvrez les tendances qui influenceront les narrations en 2023.
L’intelligence artificielle créatrice et créative
«Les médias synthétiques et l’intelligence artificielle amènent la possibilité d’alimenter des outils de narration créatifs, pour aider les artistes et créateurs à raconter leurs histoires de manière nouvelle et innovante», explique Joanna Popper, cheffe du métavers à l’agence Creative Artists Agency.
Montage vidéo avec des outils comme descript, conversion de texte en vidéo avec des solutions telles Stable Diffusion : nous pouvons nous attendre à une utilisation accrue d’outils propulsés par l’intelligence artificielle (IA) à des fins de création vidéo ou simplement pour l’amélioration de la résolution. J’ai même vu des tentatives de convertir des images en musique, ce qui laisse entrevoir la possibilité de générer des trames sonores entières à l’aide de l’IA. J’ai été en mesure d’utiliser ChatGPT d’OpenAI pour générer en quelques secondes des synopsis de films ou de séries basées sur des mots-clés.
En mettant à la portée de tous.tes un soutien qui exigeait auparavant des moyens financiers considérables (pour embaucher les services et talents nécessaires), ces outils pourraient avoir un effet démocratisant : permettre à tous.tes les créateur.rice.s de partir sur un pied d’égalité. Le contenu obtenu en cocréation avec l’IA (par exemple, pour créer différentes versions d’une scène ou d’un personnage) peut servir à inspirer les artistes et même à tester la réponse du public avant de développer un contenu.
Renforcement du pouvoir des créateur·trices face aux diffuseurs traditionnels et en ligne et aux médias sociaux
Certain.e.s artistes consacrent beaucoup de temps à bâtir l’engagement de leur communauté avec leur marque personnelle et leurs mondes, fictifs ou réels. Ces artistes ont maintenant le potentiel pour rééquilibrer le rapport de force avec les plateformes qui diffusent leur contenu. Avec la possibilité de publier du contenu directement sur une quantité croissante de plateformes, les créateur.rice.s ont davantage de choix quant à leurs décisions créatives ou à leur façon de monétiser leur contenu. «Les créateurs ont plus de pouvoir que par le passé, car ils entretiennent des liens plus forts avec leurs communautés», affirme Jim Louderback, auteur de l’infolettre hebdomadaire Inside the Creator Economy sur LinkedIn et responsable du développement de VidCon avant son acquisition par Viacom. Ces artistes bâtissent « des mondes mettant le dialogue et la communauté au premier plan », et certain.e.s trouvent des façons de bâtir des communautés plus directes avec des adeptes qui les suivent sur plus d’une plateforme. Le fait de posséder un canal où diriger le public, comme un site Web qui rassemble tous les points de contact, peut contribuer non seulement à diversifier les lieux où les adeptes se retrouvent, mais aussi à monétiser davantage la propriété intellectuelle (PI) de l’auteur.rice. L’offre peut s’étendre d’éléments numériques à collectionner à du contenu de formation. À l’inverse, si vous n’êtes que sur YouTube, par exemple, YouTube « possède » vos abonné.e.s, prévient M. Louderback.
«Les marques doivent comprendre comment la narration se produit sur les plateformes. On ne peut pas simplement répandre notre message sur une plateforme», affirme-t-il. Il est essentiel de créer du contenu adapté à l’environnement de chaque plateforme. Les détenteur·trices de PI peuvent le faire eux.elles-mêmes ou s’associer aux bons créateurs pour développer leurs univers narratifs dans de nouvelles plateformes et communautés. Cela peut susciter de nouvelles collaborations entre les créateur.rice.s de la PI et des talents qui possèdent de fortes communautés sur les réseaux sociaux. Jeff Greenspoon, président des solutions mondiales chez Dentsu, souligne que «les nouvelles dynamiques entre les marques et les créateurs exigent des modèles d’affaires ouverts et collaboratifs qui placent le consommateur au premier plan». Après tout, ajoute-t-il, «on voit de plus en plus de gens à l’intersection entre le visionnement de divertissement et l’interaction avec le contenu en ligne. Spécialement les plus jeunes, qui agissent souvent sur un second écran pendant qu’ils regardent des émissions, ou qui regardent le buzz généré par un contenu sur les médias sociaux pour choisir ce qu’ils vont regarder». Les détenteur·trices de PI doivent se battre pour se faire entendre aussi sur ces médias — et le faire de pair avec des créateur.rice.s peut aider.
Bâtir de telles collaborations entre communautés et créateur.rice.s peut également contribuer à accéder au financement. Le fait de cocréer du contenu avec des leaders de communautés peut améliorer la portée de la PI d’une histoire, mais aussi la quantité de contenu engageant et de valeur, tant pour les bâilleurs de fonds de contenu traditionnel que les marques désireuses d’atteindre les communautés de façons authentiques et innovantes qui vont au-delà de la publicité classique. Chaque plateforme ayant différentes fonctionnalités, de la possibilité de faire des vidéos en direct à celle d’utiliser la réalité augmentée pour ajouter des environnements et objets, ne pas maximiser ce que la PI d’une histoire peut apporter au public à travers divers points de contact serait une occasion manquée.
Évolution des attentes face au contenu
Les attentes des publics sur l’apparence du contenu et ce qu’ils peuvent faire avec évoluent. Les jeunes spectateur·trices, spécialement, «font moins de distinction entre le divertissement de haute et de faible production», constate M. Greenspoon. Par exemple, «les émissions de critiques et le contenu généré par les adeptes étaient autrefois perçus comme des dérivés, mais l’on s’attend maintenant à ce que le contenu soit créé pour impliquer la communauté et qu’il soit amené aux abonné·es d’une manière qui leur permet à leur tour de créer une PI adjacente qui aidera à générer de l’intérêt pour l’original.» De plus, «la croissance exponentielle du jeu vidéo nous indique que tout le contenu devrait comporter un élément interactif, que ce soit en ludifiant l’engagement de l’utilisateur ou en planifiant carrément des adaptations en jeu vidéo de la PI que vous produisez.»
Cela devrait encourager encore davantage les détenteur·trices de PI à expérimenter plusieurs façons de bâtir du contenu pour les diverses plateformes fréquentées par les communautés visées. Avec des plateformes de médias sociaux offrant de plus en plus d’interactivité, ainsi que des diffuseurs comme Netflix qui testent des fonctionnalités interactives, il ne fait aucun doute que les publics s’attendront de plus en plus à interagir avec l’univers d’une histoire.
Encore moins de barrières à la création de contenu grâce aux outils de narration spatiale
Les obstacles à la création et la distribution de contenu continuent de tomber tandis que s’améliore l’accès à des outils facilitant la création d’expériences narratives linéaires, interactives ou immersives. Ces outils peuvent permettre tant aux nouveaux créateurs qu’aux détenteurs de PI bien financés de créer des histoires qui vivent sur plusieurs plateformes.
D’après Joanna Popper, quand il s’agit de bâtir des expériences dans des environnements spatiaux, les plateformes comme Roblox ou The Sandbox, qui ne requièrent pas ou peu de code, démocratisent l’accès des créateur·rices à l’industrie. Même lorsque la création d’histoires et d’univers se fait de concert avec des créateurs ayant de compétences techniques, il devient plus facile de tenter de grandes idées et de les réaliser. L’expérience de concert de The Chainsmokers et le Festival Tycoon dans Roblox, développés par Gamefam, ont enregistré plus de 24 millions de visites, pour devenir l’expérience de concert la mieux cotée de tous les temps sur Roblox. Pour atteindre un public de cette envergure, Mme Popper estime qu’il aurait fallu plus d’un an de tournée dans les grands stades. Le talent «peut nous atteindre de manière nouvelle et attrayante… et envisager de nouvelles façons de se monétiser, comme avec de la marchandise numérique». Ces expériences représentent une utilisation efficace de l’argent des marques pour offrir des expériences numériques interactives destinées aux adeptes.
«Le 3D est une immense occasion à saisir pour les détenteurs de PI», estime Tom Emrich, directeur de la gestion de produit à 8th Wall, une filiale de Niantic. Lorsque l’on bâtit des accessoires, personnages et autres, le fait d’investir dans «des actifs en 3D pour votre PI peut ouvrir de nombreuses portes, dont leur utilisation en ligne, dans des expériences de réalité virtuelle ou augmentée ou en tant qu’œuvre numérique NFT à collectionner, et même dans un marché traditionnel comme l’imprimé. Si vous détenez une PI, vous devriez élaborer une stratégie articulée autour de contenu 3D comportant de multiples façons de distribuer et d’utiliser ce contenu pour augmenter le rendement de cet investissement.»
Pour la réalité augmentée (RA), les médias sociaux possèdent des fonctionnalités qui en facilitent l’intégration dans le contenu vidéo. Et la RA sur le Web, propulsée par des plateformes comme 8th Wall, permet au public d’interagir avec le contenu en visitant simplement un lien sur leur navigateur. D’après M. Emrich, la RA «peut améliorer et raffiner le contenu traditionnel. Pour la télé et les services par contournement, la réalité augmentée peut être intéressante pour faire passer l’émission de l’écran à la maison du téléspectateur. Quant aux médias sociaux, la RA offre aux utilisateurs de nouveaux outils pour ajouter des effets spéciaux à leur contenu.»
Les studios utilisent du contenu développé dans des moteurs de jeu pour les expériences immersives, les jeux et le contenu linéaire. Le président de Dark Slope, Dan Fill, souligne que cela est utile tant pour étendre les possibilités de la PI que pour les productions elles-mêmes. «La présence d’Unreal Engine devient généralisée dans l’industrie du divertissement. Nous verrons de plus en plus de prévisualisation faite en RV, de rendu d’images en temps réel et de nouveaux flux de production.»
Jim Louderback croit que le contenu spatial a le potentiel de «changer les règles du jeu», spécialement pour les publics plus jeunes, en métamorphosant plusieurs formes de divertissement linéaire et interactif. Dans ses mots : «dans le métavers, MrBeast vient probablement tout juste de passer sa huitième année. Le métavers est déjà là. Minecraft est là. Il possède un espace virtuel partagé. Roblox est un espace virtuel partagé où vous pouvez créer, explorer, partager des expériences et raconter des histoires.»
Matière à réflexion: à mesure que les marques consacrent des budgets sans cesse grandissants pour réaliser des expériences spatiales, nous verrons une incidence sur les sources de revenus pour les autres plateformes de distribution traditionnelles. Ne ratez pas l’occasion d’être partout où vos communautés cibles se trouvent.
*Tous les visuels pour cet article, à l'exception de l'illustration The Sandbox, ont été co-créés avec OpenAI’s DALL-E 2 - un système d'intelligence artificielle capable de créer des images et autres formes d'art à partir d'une description en langage courant.