À la rencontre de Sasha Boersma

Rooster est un rêve devenu réalité — littéralement. 

« Après une sortie avec des proches pour célébrer le Nouvel An chinois, Connie Choi, l’une des membres de notre équipe, est rentrée chez elle pour faire une sieste. Elle a fait un rêve dans lequel il y avait un coq et d’autres animaux du zodiaque », raconte Sasha Boersma, cofondatrice de Sticky Brain Studios à Toronto.

Sasha Boersma

« De retour au bureau, elle nous raconte son rêve, à moi et à mon partenaire d’affaires, Ted Brunt, puis nous dit : ‟J’aimerais en faire un jeu, pouvez-vous m’aider à le réaliser?” On s’est dit : ‟Pourquoi pas, l’idée est plutôt géniale”. » 

Grâce au financement du FMC, le studio a utilisé ce noyau d’idée pour créer un jeu d’aventure narratif. 

« C’est un jeu qui célèbre la culture chinoise ancienne avec cœur, explique Sasha Boersma. Au début du jeu, les animaux du zodiaque chinois sont réunis pour célébrer le Nouvel An, mais le coq s’avère un invité insupportable. Comme les autres animaux en ont assez de son comportement, le dragon envoie le coq dans le passé pour qu’il apprenne à devenir plus attentionné. Le jeu compte 12  niveaux offrant différents jeux, par exemple, de cuisine, d’objets cachés et de fabrication. » 

Rooster - capture d'écran. Photo: Sticky Brain Studios

Rooster est aussi un projet de rêve grâce à l’équipe qui l’a créé.  

« On est probablement l’un des studios de jeux les plus diversifiés du Canada, mentionne Sasha Boersma. L’entreprise est détenue à parts égales par un homme et une femme — Ted et moi-même — et elle est dirigée par des personnes en situation de handicap, comme moi. L’équipe de production est majoritairement composée de femmes, et près de la moitié de notre équipe vit avec des handicaps. Beaucoup s’identifient comme des personnes 2SLGBTQIA+ et les responsables créatifs de Rooster sont de la diaspora est-asiatique, ce qui assure l’authenticité de l’histoire et du jeu. » 

Sasha Boersma se définit comme autiste; en plus de diriger Sticky Brain Studios, elle est active au sein du conseil d’administration de l’Office de la représentation des personnes handicapées à l’écran (ORPHE). Son attachement à la diversité ne se limite pas à l’embauche. Il se révèle aussi dans son style de leadership. 

« Ted et moi croyons qu’il est essentiel de soutenir nos collègues. Presque tous les membres de l’équipe de Rooster assument d’une manière ou d’une autre un nouveau rôle et de nouvelles tâches dans la création du jeu. Étant donné la précarité du secteur, c’était important pour nous de veiller à ce que les membres de notre équipe acquièrent de nouvelles compétences et connaissances qui leur serviront tout au long de leur carrière. » 

Rooster représente un grand pas en avant pour Sticky Brain Studios, une petite entreprise qui a de grandes ambitions. 

« Nous sommes allés à la Game Developers Conference cette année pour lancer le jeu. Quelques éditeurs chinois ont été vraiment surpris de voir qu’il avait été fait au Canada. On nous a dit : ‟Je m’excuse, fait au Canada, peut-être, mais c’est incontestablement un jeu chinois!” C’est un énorme avantage que nous offre l’espace culturel canadien. Notre pays est tellement diversifié, la diffusion d'histoires et d'expériences de communautés sous-représentées nous ouvre les portes des marchés étrangers. » 


Ingrid Randoja
Journaliste indépendante, Ingrid Randoja est l'ancienne responsable éditoriale de la section Film du magazine NOW de Toronto, l'ancienne rédactrice en chef adjointe du magazine Cineplex et l'une des membres fondateurs de la Toronto Film Critics Association.
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