Un premier regard sur #DéfinirNotreContenu
Premières conclusions du sondage de l’industrie audiovisuelle
Au cours de la première phase de l’initiative #DéfinirNotreContenu, les parties prenantes du secteur audiovisuel et les publics canadiens ont déterminé les obstacles et les possibilités pour l’industrie, et exprimé leurs réflexions et leur vision de l’avenir.
Mandatée par le Fonds des médias du Canada, la firme de prospective La Société des demains a provoqué une discussion à l’échelle nationale sur l’avenir du contenu canadien, au moyen d’un processus ethnographique d’entrevues approfondies et d’un sondage en ligne.
Qui a répondu au sondage #DéfinirNotreContenu? ● 1556 répondant·es de l’industrie audiovisuelle; ● 1001 personnes de la population générale (de l’extérieur de l’industrie); ● 61 % de créateur·trices «linéaires» (défini·es comme des producteur·trices, réalisateur·trices, scénaristes, acteur·trices); ● 23 % de technicien·nes ou de membres d’équipes de tournage; ● 16 % de créateurs·trices de contenu numérique ou des médias numériques et interactifs; ● 15 % occupant des rôles de soutien de l’industrie; ● 70 % âgés de 34 à 64 ans. |
Voici donc, en amont du rapport final à paraître cet automne, quelques conclusions préliminaires émanant des sondages et entrevues #DéfinirNotreContenu.
Principaux défis de l’industrie
D’après les répondant·es travaillant dans le secteur audiovisuel canadien, les trois «défis les plus urgents» sont :
- Obtenir un soutien flexible et accessible pour les productions canadiennes;
Lors des entrevues approfondies, la plupart des répondant·es ont révélé une relation ambivalente avec le système de pointage. Les gens considèrent «simple» et «efficace» d’utiliser 10 points, et la vaste majorité n’était pas prête à adopter un système avec plus de points, comme celui du Royaume-Uni.
Le concept de «flexibilité» varie selon le groupe interviewé. Certains souhaitent inclure des lieux de tournage et des talents étrangers, tant que l’histoire demeure dans la perspective de créateur·trices canadien·nes. Pour les communautés autochtones nordiques, par exemple, les gens d’une même nation (ex. innue) devraient toujours être reconnus, qu’ils vivent sur le territoire ou non.
- Les services étrangers de diffusion en continu ayant des activités au Canada [et] réclamant une définition plus large du contenu canadien;
La grande majorité des personnes interviewées a applaudi l’adoption du projet de loi C-11 sur la diffusion continue en ligne, et a généralement accueilli favorablement une plus grande implication des plateformes de diffusion numériques dans la création de productions canadiennes.
Néanmoins, les services de diffusion continue présentent des défis considérables pour le système, notamment en regard du rôle qu’ils joueront dans la redéfinition du contenu canadien, ou même dans son «élargissement».
Certaines personnes craignent que de rendre la définition trop large ouvre la porte à des contributions qui favorisent les projets de langue anglaise du secteur des services ou à grand budget, au détriment des productions indépendantes plus diversifiées.
- Changements dans les habitudes de consommation des publics.
Le sondage en ligne a permis d’établir qu’environ deux tiers des répondant·es consomment des œuvres audiovisuelles chaque semaine, mais que le contenu américain domine les habitudes de visionnement des Canadien·nes (53 %).
La population générale a indiqué être légèrement plus susceptible d’écouter du contenu canadien (28 %) que les travailleur·euses de l’industrie (24 %). Cela est en partie dû aux publics québécois, qui visionnent davantage de contenu canadien (35 %) que le reste du Canada (26 %).
Les répondant·es de l’industrie audiovisuelle ont affirmé découvrir du nouveau contenu par l’entremise de «connexions humaines», comme le bouche-à-oreille ou des recommandations de curateur·trices ou d’influenceur·euses.
Dans la population générale, les répondant·es ont indiqué que leur méthode première pour découvrir du contenu était les «moyens technologiques» comme les moteurs de recherche et «peu importe ce qui se trouve sur mon fil d’actualité».
Le contenu canadien est-il distinct?
L’éventuelle révision des politiques de la Loi sur la diffusion continue en ligne par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a le potentiel de moderniser notre système de diffusion en mettant la définition même de «contenu canadien» sur la table.
Dans le sondage en ligne, les travailleur·euses de l’industrie audiovisuelle ont affirmé que la redéfinition du contenu canadien devrait considérer en priorité l’endroit où le contenu est créé et qui le crée. Cela se traduit par:
● Les créateur·trices vivant et travaillant au Canada;
● Des productions qui embauchent des Canadien·nes;
● La propriété canadienne du matériel de production et de la propriété intellectuelle (PI).
De son côté, la population générale croit plutôt que l’attention devrait se porter sur ce qui est représenté et où le contenu est filmé. Elle qualifie le contenu canadien comme étant :
● Des histoires qui mettent en scène des personnages vivant au Canada;
● Du contenu situé au Canada;
● Du contenu filmé au Canada.
Les données préliminaires laissent croire qu’il y a une distinction entre le contenu fait au Canada et le contenu fait par des Canadien·nes.
La moitié (47 %) de la population générale et le tiers (29 %) des travailleur·euses de l’industrie ont répondu ne pas penser que le contenu canadien lui-même est distinct ou ne pas savoir s’il l’est.
Lorsqu’on leur a demandé quels devraient être les objectifs derrière la redéfinition du contenu canadien, deux des trois réponses les plus populaires dans les deux groupes étaient :
● Veiller à ce que les services de diffusion continue en ligne investissent dans le contenu canadien;
● Veiller à la stabilité et la prévisibilité économique des entreprises et travailleurs·euses canadien·nes.
Pour la population générale, l’objectif le plus commun était de promouvoir la fierté, un sentiment d’identité nationale et la cohésion sociale. Pour les travailleur·euses de l’industrie, le troisième objectif le plus nommé était d’encourager la PI canadienne.
Plus de la moitié (57 %) des répondant·es croient que la mobilisation de talents canadiens est la meilleure façon d’augmenter la compétitivité et de créer des retombées économiques positives pour l’industrie.
La PI est centrale
Les joueur·euses de l’industrie perçoivent particulièrement la rétention et la monétisation de la PI comme étant essentielles pour l’avenir, et lui accordent une grande importance à trois questions différentes.
● 60 % ont affirmé que la rétention de la PI est un élément important à considérer dans la redéfinition réglementaire du contenu canadien;
● 45 % ont établi la PI comme un élément clé à prendre en considération pour assurer la compétitivité et les retombées économiques;
● 38 % voient la PI comme un élément important pour assurer la présence de la diversité, de la culture et des talents canadiens à l’écran.
Dans les entrevues ethnographiques, des questions sur le lien entre la PI canadienne et le contrôle créatif ont maintes fois été soulevées, ce qui laisse entendre que des distinctions plus grandes pourraient élargir la portée de ce qui est considéré comme étant un «contenu canadien».
Diversité : un défi et une force
En plus des inquiétudes entourant la propriété intellectuelle, la simplification des modèles et la rétention du talent, le principal sujet à émerger de #DéfinirNotreContenu était que la majorité des répondant·es ne se sent pas bien représentée par les étiquettes.
La définition même du contenu canadien était perçue par plusieurs tant comme un mécanisme de protection et un levier pour l’industrie que comme un obstacle à l’accès.
«La diversité», affirment les répondant·es, est aussi difficile à atteindre qu’elle représente une caractéristique distinctive de l’industrie. Certaines personnes interviewées avaient le sentiment que la recherche de la diversité rendait le système de diffusion complexe et difficile à redéfinir, alors que d’autres considéraient la diversité comme le principal point distinctif du contenu canadien.
De façon similaire, les personnes de l’industrie interviewées ont affiché une forte tendance à se définir par leur «mission professionnelle», se divisant en deux grandes catégories :
1. Celles et ceux qui ne se sont jamais sentis représentés et veulent créer une industrie et un système différents;
2. Celles et ceux qui s’identifient à la «culture des écrans» avec laquelle elles et ils ont grandi et qui souhaitent la protéger.
Il semble y avoir une tension entre deux positions, diversifier l’industrie et résister au changement, bien que d’aucuns reconnaissent la valeur d’un contenu canadien distinct.
Prochaine étape: le rapport «Ce que vous avez dit»
Restez à l’affût de la sortie du rapport final de l’initiative #DéfinirNotreContenu, prévue à l’automne 2023.
Peu après, le CRTC commencera sa révision des définitions du contenu canadien et examinera des définitions du contenu autochtone, analysera plus en profondeur la nouvelle loi et prendra des décisions clés sur un nouveau cadre réglementaire.